32 logements-cathédrale et espaces partagés
Less is more !
As often in urban developments in France, the objectives of diversity of planners, crossed with the objectives of profitability of developers, comes in a planning propositions broken down into three products: individual town houses, intermediate dwellings and collective housing buildings. In Dijon, the architect Sophie Delhay resists to the temptation of segregation of urban forms by proposing principles that govern the 3 housing typologies until they merge into a unitary whole. The 32 dwellings, comprising all 3 typologies are mainly distinguished by their access mode - individual for the houses, by landing serving two apartments for the intermediate dwellings, and by outdoor passageways for the collective housing. However, the same ambitions and the same principles apply to all typologies. All the apartments are characterized by their double height and double oriented living rooms offering a great freedom of appropriation. Everywhere the same very high windows are protected by xxl custom made curtains. On the façade, the unity of the project is sealed by strong constructive principles, a rigorous grid and a unitary materiality. The rough concrete and the glass of the very large windows characterize the project whose radicalism quarrels with the friendliness of the building in a rather new way. Sophie Delhay has once again created tailor-made life scenarios for this community of inhabitants, aiming to thwart the persisting standards of housing in order to offer creative typologies, to compose porous interfaces between the privacy of the home and the collectiveness of the city. Creating a double height space is certainly less surface for the apartments, but also the proof that paradoxically, the missing room becomes extra space. Or the illustration that less is more.
Text by Sophie Delhay studio
C’est dans la périphérie de Dijon, entre une route nationale, des collines hérissées d’arbres et des terrains de sports qui accueillent régulièrement le FCO Dijon, que se niche l’éco-cité des Maraichers dont l’ANMA est urbaniste coordinateur.
L’opération de Sophie Delhay réalisée pour le promoteur Logivie en dessine la pointe sud-est.
Comme souvent dans les opérations urbaines en France, l’objectif de mixité des aménageurs, croisé avec l’objectif de rentabilité de promoteurs, se décline dans une commande ventilée en trois produits : des maisons individuelles, des logements intermédiaires et un ensemble collectif.
Et encore une fois, l’architecte Sophie Delhay résiste à la ségrégation des formes urbaines en proposant des principes qui gouvernent les trois expressions typologiques jusqu’à les fondre dans un tout unitaire. Ainsi ses 32 logements se répartissent en un collectif, 5 maisons individuelles et 5 logements intermédiaires qui se distinguent principalement par leur mode d’accès — individuels pour les maisons, par pallier desservant deux habitations pour les logements intermédiaires, et par cages et coursives pour les collectifs.
Cependant les mêmes ambitions et les mêmes principes se déclinent pour tous. Les 32 logements se distinguent par leur salons-cathédrales traversant le logement de part en part et offrant une grande liberté d’appropriation. Partout on retrouve les mêmes larges fenêtres protégées par des larges rideaux. En façade, l’unité du projet est scellée par des principes constructifs forts, une trame rigoureuse et une matérialité unitaire. Le béton brut et le verre des vastes fenêtres de toute hauteur caractérisent cet ensemble dont la radicalité le dispute à la convivialité de manière passablement inédite.
C’est paradoxalement dans les quatre règles du jeu édictées par l’urbaniste aménageur du quartier que Sophie Delay a trouvé matière à singulariser et unifier ses logements. Tout d’abord, face à des sols pollués, les parkings ne pouvaient se trouver qu’en surface, ouverts et traversants pour accéder aux logements.
Sophie Delhay choisit de les installer entre les pilotis qui portent les logements, une travée en double hauteur apportant lumière et espace à cette séquence inaugurale. Libéré des espaces vélo et de l’escalier de secours des logements situé aux étages, le parking parvient à n’occuper qu’un niveau (le rdc) contre deux prévus initialement.
L’espace libéré à l’étage est alors affecté à un espace collectif partagé, accessible par les habitants depuis le jardin, et par les usagers du quartier depuis la rue, une proposition accueillie favorablement par l’urbaniste et la Sem. L’escalier de secours ne se loge plus dans le parking mais se dresse majestueusement sur la façade côté jardin, sa lumière naturelle et sa théâtralité incitant l’ensemble des habitants de l’opération à l’emprunter quotidiennement. Une fois n’est pas coutume, une rampe latérale permet aux vélos d’accéder à l’étage où se trouve le local qui leur est destiné.
Ensuite, chaque îlot devait intégrer la possibilité d’une densification future sur 10 à 20 % de sa parcelle. La parcelle triangulaire ne permettant pas de réserver un espace au sol pour une construction future, Sophie Delhay propose une interprétation audacieuse et inattendue de cette règle. Elle aborde en effet la densification souhaitée à l’échelle du logement et non de la parcelle.
Ainsi, chaque logement dispose d’une partie de séjour en double hauteur permettant d’envisager des surfaces de plancher supplémentaires, au cas par cas par un système de mezzanine, ou à l’échelle de l’immeuble avec le comblement des trémies par des dalles.
Loin de grever l’opération par des espaces en blanc sanctuarisés cette disposition offre d’emblée un plus à chaque logement.
Ce principe se décline de 3 manières selon les typologies. Dans l’immeuble collectif, les logements sont accessibles par la coursive au nord côté rue. Les séjours traversants rassemblent, en enfilade, une entrée, une cuisine-bar et un living qui ouvre sur le jardin. Les doubles hauteurs forment côté sud un principe de quinconces pour composer une « façade cathédrales ». Des typologies en duplex se logent dans les attiques.
Le petit plot de logements intermédiaires à R+4 est desservi par un escalier. Chaque étage abrite un seul logement disposant d’une triple orientation, et des séjours en angle. Le plan d’étage tourne d’un quart de tour à chaque étage pour permettre la mise en place des parties en double hauteur.
Desservies par un patio individuel en pleine terre qui met naturellement à distance le jardin collectif, les 5 maisons profitent quant à elles d’une pièce en double hauteur de plain-pied avec leur espace extérieur privatif. Les chambres donnent latéralement sur ce patio de sorte à protéger leur intimité.
De plus, la fiche de lot exigeait des toitures en pentes à l’exception des terrasses accessibles de sorte à créer un skyline variée.
Sophie Delhay fait de l’exception la règle et rend la plus grande partie des toits accessibles. Ils se transforment en terrasses d’étages pour les maisons et renforcent les qualités des jardins individuels. Une terrasse partagée s’étend sur 235 m2 de la toiture du collectif, offrant à tous un panorama sur la périphérie de Dijon, et les soirs de match une vue privilégiée sur le terrain de foot juste en proximité.
Pour finir, les constructions se devaient d’être à l’alignement. Les immeubles collectifs devaient façonner le front du boulevard tandis que logements intermédiaires et maisons individuelles devaient se décliner en gradin du plus haut au plus bas.
La situation atypique de l’îlot en bout de mail urbain a invité Sophie Delhay à inverser les logements intermédiaires et les logements individuels pour ériger un petit plot compact et urbain signalant l’entrée de ce nouveau quartier.
C’est de la contrainte que nait la liberté. En intégrant celles de l’urbaniste coordinateur, Sophie Delhay a enrichi sa capacité à créer des scenarios de vie sur mesure pour leur communauté d’habitants, à déjouer les standards et les attendus de la fabrique du logement pour proposer ici des typologies créatives, à mettre en pièce le logement enfin, pour composer des interfaces poreuses entre l’intime de l’habitat et le collectif propre à la ville. Ici, paradoxalement, c’est la pièce en moins qui devient la pièce en plus. Ou l’illustration en somme que less is more.